ETUDES SUPÉRIEURES _FRANCE/Les universités s’alarment face à l’afflux massif d’étudiants à la rentrée
Le taux de réussite exceptionnel au bac en 2020, questionne quant à la capacité des universités à accueillir ces milliers d’étudiants supplémentaires. Le chiffre est historique. En 2020, 91,5% des 740.000 candidats ont obtenu leur baccalauréat, avant même les oraux de rattrapage et la session «de remplacement» de septembre, qui permettra à ceux n’ayant pas obtenu leur diplôme de retenter leur chance en passant les épreuves. Un taux de réussite qui risque donc d’augmenter encore un peu plus, pulvérisant ainsi tous les records des années précédentes et donnant donc la possibilité à davantage de jeunes que d’habitude d’entrer dans l’enseignement supérieur. Dès la publication des résultats, la Conférence des présidents d’université (CPU) a réclamé «une réunion d’urgence, sous l’égide du Premier ministre», Jean Castex, pour évoquer la situation. «Il y a eu cette année au moins 657.000 bacheliers, soit près de 100.000 de plus que l’an passé avant rattrapage. Jamais de tels chiffres n’avaient été atteints», s’alarme l’organisation. Le président de la CPU, Gilles Roussel, explique cette inquiétude: «L’augmentation du nombre d’étudiants dans nos universités est constante ces dernières années, et nous avons déjà des difficultés à suivre, par manque de place. La rentrée 2020 risque d’être encore plus compliquée.» L’organisation alerte donc le gouvernement: le système universitaire n’est pas prêt à accueillir cet afflux soudain de nouveaux étudiants, d’autant qu’il fait face, selon elle, à «un sous financement chronique et historique». «La rentrée 2020 (…) pose des questions cruciales de moyens humains, financiers, mais également de capacités d’accueil, de volumes d’équipements, de logements des étudiants, de suivi médical», explique la CPU. «Il va falloir trouver rapidement une solution car on ne peut pas pousser les murs», estime Gilles Roussel, son président. Les étudiants vont reprendre leurs études D’autant que les universités vont se heurter à un autre problème: de nombreux diplômés de master vont vouloir poursuivre leurs études cette année, afin de ne pas entrer dans un marché du travail saturé à cause de la crise économique. «Certains vont même vouloir reprendre leurs études car ils n’auront pas de travail. Cette hausse du nombre d’étudiants dans nos universités va être difficile, car nous allons en plus devoir composer avec la crise sanitaire. Nous allons avoir plus d’étudiants et moins de place pour les accueillir, car nous devrons faire respecter les distances de sécurité», prévient Guillaume Gellé, président de l’université de Reims. Des places vont être créées Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation nationale, s’est voulu rassurant ces derniers jours, rappelant la nécessité de trouver une place à ceux qui souhaitent s’inscrire dans l’enseignement supérieur. «Notre objectif est que chacun ait une place qui lui convienne», a-t-il plaidé après la publication des résultats, précisant lors d’un interview sur BFM TV que pour l’instant «environ huit lycéens sur dix ont reçu une proposition» sur la plateforme d’orientation Parcoursup. «Nous aimerions accueillir tout le monde, mais nous n’avons pas les moyens humains et immobiliers» Mais tous les étudiants ne sont pas acceptés à l’université chaque année, et encore moins dans la filière de leur choix. Le ministère de l’Enseignement supérieur a d’ailleurs confirmé à l’AFP que les candidats sans proposition cette année seront probablement «plus nombreux» que d’habitude. Pour remédier à ces problèmes, le ministère travaille à la création de nouvelles places dans les universités, les BTS, mais aussi, les centres de formation des apprentis (CFA), selon BFMTV. Et 3.600 places dans des filières courtes post-bac, comme les BTS, auraient même d’ores et déjà été créées, d’après l’AFP. Les universités, quant à elles, se rassurent comme elles peuvent. «Comme cela a été le cas pour les bacheliers cette année, nous aussi avons noté nos étudiants avec bienveillance, avoue Guillaume Gellé. Il est donc fort probable que le taux de redoublement soit moins important que les années précédentes et que cela libère des places aux nouveaux étudiants.» Le distanciel... en attendant mieux En attendant d’éventuels moyens supplémentaires de l’État, les universités se préparent donc à cet afflux d’étudiants. «Nous devons trouver des solutions, elles sont complexes et se feront en fonction des situations locales. Nous aimerions accueillir tout le monde, mais nous n’avons pas les moyens humains et immobiliers», argue Guillaume Gellé. Les cours en distanciel, qui devaient de toute façon être mis en place à la rentrée dans un certain nombre d’universités, semblent une solution provisoire toute trouvée. «Même si nous privilégions le présentiel, il faudra peut-être avoir recours aux cours en ligne», anticipe Mathieu Avanzi, maître de conférences en linguistique française à Sorbonne Université. «S’il y a trop d’étudiants dans les salles, que les couloirs sont bondés et que nous avons des contraintes de distanciation physique, nous allons devoir répartir les jeunes par groupe et les faire venir une semaine sur deux», estime-t-il, précisant qu’une partie des cours pourrait donc être à suivre «à distance». Sorbonne Université prévoit d’ailleurs un «pack numérique» pour les étudiants en difficultés financières: un ordinateur leur sera fourni à un prix très avantageux grâce à un partenariat avec la marque HP.